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2012 septembre 26 - LEPROGRES - La cigogne noire refait son nid dans le Jura pour la première fois depuis 35 ans

jeudi 1er août 2013, par GENDRE Nicolas

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Jura - Nature.

La cigogne noire refait son nid dans le Jura pour la première fois depuis 35 ans

Faune sauvage. Pour les ornithologues, la découverte est exceptionnelle : un nid de cigognes noires a été trouvé, cet été, en forêt de Chaux. Le dernier remonte à 1977. Dans un souci de protection, sa localisation est « top secret ».
Cette cigogne est l’une de celles qui s’est installée, cet été, en forêt de Chaux.

Cette cigogne est l’une de celles qui s’est installée, cet été, en forêt de Chaux.

Le commun des mortels l’ignore : les cigognes, ces grands oiseaux blancs au bec rouge (censés apporter les bébés dans les légendes alsaciennes), existent aussi en noir. Les couleurs sont alors inversées : les oiseaux sont noirs, avec quelques taches de blanc. Des oiseaux rares, protégés, qu’on ne voit que très rarement. Si la blanche a elle aussi été proche de l’extinction il y a 50 ans, elle reste rare dans la région mais est aujourd’hui beaucoup plus « commune » (1 000 couples sont recensés en France). La cigogne noire a complètement disparu de France pendant plusieurs décennies : le dernier nid a été recensé dans le Jura, en 1977, il y a 35 ans. Insolite, c’est là qu’elle est réapparue, ou en tout cas qu’un nid, avec un couple et plusieurs jeunes, a été découvert. C’était cet été en forêt de Chaux, dans le nord du département.Pour les ornithologues francs-comtois, la découverte est « exceptionnelle ».

« Sa population est estimée à un nombre de 30 à 60 couples en France, commente Jean-Luc Dessolin, chef du service appui et travaux à l’Office national des forêts (ONF) du Jura et spécialiste ornithologique. 23 nids seulement ont été trouvés cette année, et il y en a un dans le Jura, au milieu d’un massif de 23 000 hectares ! C’est un oiseau mystère, c’est pour ça qu’il est aussi intéressant ! La cigogne noire est très différente de la blanche : c’est une cigogne de forêt très farouche, contrairement à la blanche qui semble rechercher la présence de l’homme en nichant jusqu’aux toits des maisons. Il arrive qu’on en voit passer dans le ciel franc-comtois au moment des migrations, comme en ce moment, à l’automne et au printemps, mais trouver un nid est très rare. »

Celui trouvé cet été l’a été grâce à son flair et à celui d’un autre spécialiste, Jean-Philippe Paul, coordinateur biodiversité à la Ligue de protection des oiseaux (LPO) Franche-Comté. Lorsqu’en juillet, un agent forestier de l’ONF a signalé une cigogne noire en forêt de Chaux, son comportement leur a immédiatement semblé « bizarre ».

Un lieu « top secret »

« Typiquement celui d’un jeune tout juste sorti du nid qui sait à peine voler ». Tous deux se sont rendus sur place et ont fini par localiser le nid. Mais ils ne l’ont ni approché ni pris en photo ; le lieu est tenu secret. « C’est un événement et on souhaite les protéger, reprend Jean-Luc Dessolin. Et pour ce faire le mieux est de les laisser tranquille. On a vérifié qu’il n’y avait pas d’exploitation forestière ni de coupes d’arbres prévues dans les années à venir. » Les cigognes ont été baptisées, d’un nom qui lui aussi reste « top secret » : « il pourrait révéler leur localisation ! ».

Car ce que craignent les spécialistes, c’est de les voir partir. « En 1977, lorsque le dernier nid avait été découvert dans le Jura, entre la forêt de Chaux et la Bresse, c’était un tel événement que tout un défilé de curieux avait accouru. Les cigognes ont été dérangées et le couple a fini par abandonner le nid », raconte Jean-Philippe Paul. Pourquoi la cigogne noire a-t-elle disparu ? « Comme pour tous les oiseaux, on peut penser aux pesticides et au braconnage. Mais il est aussi possible qu’elle soit passée inaperçue, il n’y a pas grand monde qui la cherche ! » Elle signerait son retour grâce aux mesures de protection et trouverait dans le Jura les grands massifs forestiers, peu peuplés, avec des zones humides et des ruisseaux comme elle les affectionne. Sa plus grande menace vient aujourd’hui des grandes infrastructures du réseau électrique aérien et des éoliennes (une cigogne noire recueillie, cet été, en Côte-d’Or, est actuellement en soins au centre Athénas).

Les cigognes noires jurassiennes sont probablement en train de partir au chaud, vers l’Espagne et l’Afrique ; si tout va bien, elles devraient repasser par chez nous lors de leur prochaine migration, direction l’Europe de l’Est. Une centaine a déjà été recensée par les observateurs bénévoles, depuis août, de passage par l’arc jurassien. Un record.

Delphine Givord